LeAm – DJ, producteur, moitié de MA/JI
– Quel est ton parcours ?
J’ai évolué et touché un peu à divers milieux artistiques ces 10/12 dernières années. J’ai fait du graphisme, de la photo, j’ai bossé en prod dans la mode, mais mes deux piliers principaux ont vraiment été la musique et le cinéma.
J’ai commencé très jeune en tant qu’assistant réalisateur dans le ciné, étant né et ayant passé mon enfance et adolescence à Nice, je suis très vite monté à Paris pour ça, l’idée étant d’y évoluer pour en arriver à la réalisation, mon rêve de gosse, auquel j’ai fini par toucher un petit peu.
Ensuite, j’ai fait deux courts métrages et un clip qui ont pas trop mal tourné à l’époque.
De l’autre côté, j’ai commencé à mixer en 2002 mais à l’époque c’était plus un hobby qu’autre chose, je faisais quelque dates par ci par là dans le sud, mais j’ai arrêté en arrivant à Paris car trop focus sur le cinéma.
Puis quelques années après il y a eu MySpace.
Complètement attiré par cette plateforme et son énergie, j’ai alors tenté de produire quelques trucs, mixs & tracks pour le fun. C’était fait totalement de bric et de broc, n’ayant aucune formation de producteur/musicien, ni même les vrais logiciels pour. Mais en 2008 ça a pris, comme ça, du jour au lendemain.
Je n’avais pas posé un disque face à des gens depuis trois-quatre ans, et là le label de Vitalic m’appelle pour me mettre sur un festival, on me propose des dates à Paris, en festivals, je rencontre mon agent qui me prend sous son aile, et quelques mois après je me retrouve à jouer à New York, en Europe, à Singapour. J’étais en train d’écrire mon troisième court à l’époque… Autant te dire que le scénar’ n’a jamais été fini…
Le choix et le changement total de direction pro s’est fait comme ça. C’était totalement inattendu et je pensais alors que je reviendrai un peu plus tard au cinéma, mais la musique m’a pris ces huit dernières années et je ne regrette pas mon choix.
– Présente nous ton ou tes tafs ?
Je mixe donc « professionnellement » si je puis dire depuis presque 9 ans maintenant sous l’alias LeAm, j’ai également un jeune projet en duo avec mon acolyte Naughty J (ex dj de NTM/B.O.S.S.) sous le nom de MA/JI, on fait de l’Afro House, on a tourné toute l’année dernière en France avec le BPM contest, dans des cools clubs à clôturer les sets d’Agoria, Kenny Dope, Gui Boratto, Dj Tennis… et sorti un premier EP/single en décembre sur le label Djoon qui tourne plutôt bien.
Et puis il y a mon projet perso/mon bébé, qui est lui beaucoup plus axé rock, sur lequel je bosse depuis très longtemps, et qui doit enfin voir le jour dans les mois à venir, ça sera sous un autre nom, beaucoup de choses à dire, mais ça vaudra peut être le coup d’une autre entrevue aha.
– Qu’est-ce qui t’a poussé à faire ce métier ?
Comme je te disais, ce métier est venu me tirer par la jambe un peu inopinément. Mais en dehors de ma réelle addiction et passion pour la musique, réponse bateau je te l’accorde, mais bien réel, je crois que tout simplement je l’aime pour son aspect créatif. Côté mix, comme particulièrement côté production/composition, soit m’attaquer à un milieu qui m’était totalement étranger et que je découvre encore au jour le jour (je n’ai aucune formation de solfège ou de musique quelle qu’elle soit).
Et puis il y a cet échange avec les gens qui est hyper fort. Qu’il soit en direct, comme sur un dj set, ou indirect, quand tu sors un morceau, et les retours dessus en résultant. Et cet échange est totalement différent entre le dj set et la production, mais tout aussi intéressant.
Quand je mixe, je suis là principalement pour faire kiffer les gens, en tout cas j’ai toujours vu ce métier comme ça. Tout en respectant mes propres goûts, mes envies, et sans pour autant vendre mon cul, je vais toujours aller dans le sens des gens face à moi. Je pense qu’il faut toujours de la remise en question et pas mal d’analyse et de psychologie face au public pendant un set, il faut qu’il y ai une sorte de communion, d’entente cordiale, d’échange donc, et à chaque fois le public est différent, donc tu repars à zéro sur chaque date, rien n’est acquis. Et si tu veux jouer avec les « émotions », si je puis dire, tu ne pourras le voir qu’en direct, pas en amont.
J’ai toujours une légère ligne directrice dans ma tête en fonction du lieu, de mon mood, et du style que je vais jouer avant une date, mais je ne prépare jamais un set et ne sait jamais vraiment ou je vais l’emmener pour toutes ces raisons.
Bref, c’est donc quand ça marche des deux côtés du booth, que là tu prends vraiment ton pied.
Côté production, c’est dans le sens inverse, tu bosses tout seul dans ton studio, et tu cherches d’abord à te faire plaisir à toi (pour ma part je le vois comme ça). J’aspire à du plaisir et de l’excitation durant tout le processus de création. J’ai envie de produire la musique qui me fait kiffer et non pas celle qui pourrait potentiellement marcher. Il existe des hit makers très doués et des gens qui produisent dans ce sens, mais ce n’est pas mon cas.
J’aime faire au feeling, après si la musique que j’aime et que je produis se transforme potentiellement en un hit derrière ou parle à beaucoup, tant mieux, mais ce sera au public de le dire (et l’avenir aussi me concernant !). Car une fois que tu as le produit fini et que ça sort, cela ne t’appartient définitivement plus, ça appartient à ceux qui l’écoutent. C’est le format qui veut ça et tu ne peux pas rebondir et tout changer dans la minute qui suit, à l’inverse d’un dj set en live s’il vient à ne pas plaire. C’est là qu’est la réelle différence mais du coup d’autres échanges se créent, par les retours. Qu’ils soient positifs ou qu’ils soient négatifs, cela te fait avancer, te remettre en question ou progresser.
C’est donc toutes ces interactivités sous leurs multiples facettes que je trouve vraiment intéressantes dans ce boulot.
– Peux tu nous donner quelques différences entre ton travail maintenant et celui d’avant ? Les points communs ?
Des différences il y en a des tonnes, évidemment.
L’aspect social est par exemple très différent. Sur un tournage de film, il y a une réelle famille, même si éphémère, qui se crée avec les techniciens, les comédiens etc… et c’est très fort, car la plupart du temps tu ne connaissais pas ces gens quelques jours avant. Tout le monde devient très proche pendant 5 jours, 2 semaines, trois mois, surtout quand tu tournes en dehors de Paris, car tu passes du coup H/24 avec eux et qu’il faut qu’on soit tous main dans la main pour mener à bien le taff. Bref c’est hyper instructif et plaisant.
En tant que Dj, c’est l’inverse, tu es quasiment tout le temps seul, tu pars sur des destinations seulement quelques heures, tu rencontres les gens qui te bookent souvent très brièvement, et la plupart du temps ton smartphone est ton meilleur pote, mais au final, pour moi, le plaisir est semblable. J’adore tout autant commencer un set à 4 du mat dans un club chauffé à blanc comme chez Tao pendant Calvi on The rocks, comme j’adorais être debout à la même heure en plein hiver glacial dans une cité, pour gérer en tant qu’assistant réal la complexité d’un plan séquence sur un super polar.
J’ai eu la chance que ces deux boulots m’aient toujours vraiment excité, et pour les points communs, je pourrais aussi citer le processus de création qui était pour moi similaire quand j’écrivais et réalisais que celui que je t’expliquais juste avant pour la musique.
– Qu’est-ce qui fait ta particularité ?
Peut être ne pas avoir une étiquette musicale collée au front et savoir naviguer entre les styles, car j’aime beaucoup trop de genres musicaux pour ne m’arrêter que sur un seul en terme de mix. Je me suis battu pour ça toutes ces années, cela m’a valu beaucoup de critique (les gens adorent mettre dans des cases), pas mal de jalousie, comme enlevé beaucoup de plans de taf, mais si je devais m’arrêter à ça… J’aime l’idée qu’on puisses me trouver un jour sur un gros festival en Belgique à jouer de la techno, le lendemain dans un petit club d’Oberkampf pour une bonne session purement hip hop et rap, et le surlendemain à orchestrer la soirée des César en smoking et en mode open format. Ma base line à l’époque de MySpace était « l’éclectisme est de rigueur », je crois que je ne m’en suis jamais vraiment éloigné…
– Des modèles ou influenceurs ? Dans le métier ou dans ta vie de tous les jours ?
On pourrait plus parler de coup de cœur, ou de gens qui m’ont aidé ou fait avancer.
Pour le côté nuit, je pense à Lionel Bensemoun et Greg Boust avec qui j’ai bossé pendant des années sur la grande période du club Le Baron que ce soit en France ou à l’étranger; il y a Benoit Nicolazo, Cédric Russo, et toute l’équipe de la Villa Schweppes qui sont de véritables amis et une famille de cœur; Albane Cléret avec qui je collabore depuis des années et dont j’ai un immense respect pour le parcours professionnel et notre entente.
Côté musique, des artistes comme Jamaica, The Shoes, Irfane, qui m’ont filé des coups mains au début et m’ont motivé, et je pense aussi à un de mes principaux collaborateurs sur mon disque et un gros artiste en devenir selon moi : Beach Wolf.
Après, pêle-mêle, Athys De Galzain, réalisateur et chef op extrêmement talentueux dont on va beaucoup entendre parler très vite je pense, ou Mathieu Gontier, restaurateur, dont j’aime la manière de penser son business, d’avancer et d’être, et pour finir Guillaume Bianciotto sans qui je ne serai là aujourd’hui et il sait pourquoi !
J’en oublie plein et je pense qu’on peut arrêter là le name dropping!
– Une journée type ?
Avec mon travail j’ai la chance qu’aucune journée ne soit type. Entre les sets, les voyages, les rencontres, les sessions en studio, et mon entourage, on est loin du métro / boulot / dodo.
– Comment te comportes tu lorsque tu travailles ?
Je suis très voir trop perfectionniste, un défaut qu’on me reproche souvent mais qui, je pense, peut être parfois une qualité.
– Quel est ton actualité?
Pas mal de dates sur Paris et ailleurs dans les deux mois à venir, et puis le “marathon set“ annuel du Festival de Cannes en Mai pour la Villa Schweppes et Albane justement.
Concernant MA/JI, on sort un EP pour le printemps, on joue ce mois-ci à Montpellier et à Anvers, et il y a quelques dates exotiques cools qui se profilent pour l’été.
Ensuite il y a la sortie de mon disque perso dans l’année, et pour finir sur un autre registre, ma soirée mensuelle au bar des Bains à Paris avec ma clique, « Les 7 Salopards », qui est partie d’une connerie autour d’un verre avec mon ami Marco Prince et le directeur du bar, Julien Deba, et qui s’avère être un chouette succès, alliant réunion de potes derrière les platines et joyeux bordel.
– Quand tu veux te détendre quel est ton endroit préféré ?
Sans hésiter la Corse, et plus particulièrement La Balagne.
– Les « belles personnes » autour de toi ?
Elles se reconnaitront, beaucoup d’entre elles ne sont malheureusement pas sur Paris, mais je ne perds jamais contact. Les autres sont près de moi chaque jour.
– Une phrase que tu répètes tout le temps et qui pourrait te définir ?
Progresser. Toujours.
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